N est la population mondiale,

le produit intérieur moyen par habitant,

la
quantité d’énergie consommée par unité
de produit intérieur, appelée aussi intensité
énergétique,

la
quantité de CO
2 émis par unité
d’énergie consommée. Les scénarios
qui sont construits pour prévoir l’évolution
du climat (par exemple ceux utilisés par le Groupement
Intergouvernemental d’Etude du Climat (GIEC) doivent donc
faire des hypothèses sur l’évolution de chacun
de ces facteurs.
Les projections des démographes indiquent que la population
mondiale devraient passer par un maximum compris entre 8 et 10
milliards d’hommes aux environs de 2050 pour décroître lentement après cette date.
En 2000 la valeur du produit intérieur moyen mondial par
habitant valait environ 6000 dollars. Elle avait augmenté
à un rythme d’environ 3% par an entre 1980 et 2000.
Les taux d’augmentation annuels entre 2000 et 2050 retenus
par les scénarios prospectifs sont compris entre 1 et 1,7%.
On peut d’ailleurs se demander si, compte tenu de la rapidité
actuelle du développement de la Chine et de l’Inde
ces valeurs ne sont pas sous-estimées.
L’expérience montre que les intensités énergétiques
diminuent lorsque le produit intérieur par habitant augmente.
Le rythme annuel de cette diminution estimé entre 2000
et 2050 est de l’ordre de 1%. Il pourrait être supérieur
si des politiques fortes d’économie d’énergie
étaient mises en oeuvre.
Finalement les scénarios prévoient une augmentation
de la consommation énergétique mondiale de 10 milliards
de tonnes équivalent pétrole (Gtep) en 2000 aux
environs de 20 Gtep en 2050, des politiques d’économie
d’énergie permettant éventuellement de ramener
cette valeur aux environs de 15 Gtep. En tout état de cause
il semble irréaliste, sauf catastrophe économique
d’espérer une stabilisation et, a fortiori, une décroissance
de la consommation énergétique mondiale d’ici 2050.
En 2000 la quantité de CO
2 émise était de
0,65 tonnes de Carbonne équivalent par tep consommée
(tC/tep) en moyenne pour le monde. Si on conservait la même
« intensité Carbone » en 2050, les rejets de
gaz carbonique correspondant à une consommation de 20 Gtep
atteindraient donc 13 GtC. En admettant que la capacité
d’absorption de l’océan reste de 3 GtC, que
la contribution du changement d’affectation des sols s’annule
et que les émissions se stabilisent à leur niveau
de 2050, on trouve que 850 milliards de tonnes de Carbone supplémentaires
seront stockés dans l’atmosphère en 2100.
Le stock total de Carbone atteindrait donc 1600 GtC et la concentration
770 ppm. L’augmentation de température serait alors
comprise entre 3 et 5 degrés. L’utilisation des modèles
beaucoup plus raffinés utilisés par le GIEC conduisent
à une fourchette d’augmentation de température
comprise entre 1,8 et 6 degrés. Ces valeurs sont en bon
agrément avec celles que nous avons calculées par
les très simples considérations ci-dessus.
Les modèles climatiques actuels ne prennent pas encore
en compte de façon satisfaisante certaines évolutions
non linéaires qui pourraient accélérer notoirement
le réchauffement :
• Il est possible que la biomasse
ou(et) l’océan se mettent à rejeter du gaz
carbonique à leur tour.
• Les énormes quantités
de méthane stockés dans le sol gelé de la
Sibérie et du Canada pourraient être relâchés
plus ou moins vite
• En sens inverse, du fait de précipitations
accrues aux hautes latitudes tendant à diminuer la salinité
et, donc, la densité des eaux de surface on pourrait observer
un ralentissement ou un arrêt de la circulation thermohyaline,
conduisant à un refroidissement sévère de
l’Europe, surtout en hiver.
Le seul espoir de stabiliser ou réduire les émissions
de gaz carbonique réside dans la dé carbonisation
des méthodes de production d’énergie. Or,
en 1995, un pays comme la Suède n’émettait
que 0,35 tC/tep. Parmi les autres pays, la France émettait
0,43 tC/tep, l’Allemagne et les USA environ 0,74 tC/tep
et le Danemark 0,87. Si les émissions moyennes mondiales
étaient ramenées au niveau de celles de la Suède,
les rejets annuels en 2050 seraient ramenés à 7
GtC, autrement dit ils seraient stabilisés à leur
niveau actuel. Dans la même hypothèse, en 2000 les
rejets de CO
2 dus à l’utilisation des
combustibles fossiles auraient été de 3,5 GtC au
lieu de 6 ; l’augmentation de la concentration de CO
2
dans l’atmosphère serait faible.
La raison de la bonne performance de pays comme la Suède
et la France est que ces pays n’utilisent pratiquement pas
de combustibles fossiles pour produire leur électricité : elles recourent essentiellement à l’énergie
nucléaire et à l’hydroélectricité.
Malgré tout, la décarbonisation de la production
d’électricité ne sera pas suffisante pour stabiliser la concentration de gaz carbonique dans l’atmosphère.
La production d’électricité ne représente qu’un tiers de la consommation mondiale d’énergie
primaire. Les transports en utilisent environ un quart et ne se
prêtent pas facilement à un remplacement des combustibles
fossiles. Par contre la fraction restante, soit plus de 40%, correspond
essentiellement à de la production de chaleur à
basse et haute température pour l’industrie ou le
résidentiel. De nombreuses possibilités existent
pour limiter et même supprimer le recours aux combustibles
fossiles dans ce domaine : utilisation, grâce à la
cogénération, des calories rejetées par les
centrales thermiques (nucléaires par exemple), utilisation
de la chaleur solaire, de la géothermie, de la combustion
de la biomasse ; les pompes à chaleur permettent d’utiliser
l’électricité pour faire de la chaleur avec une bonne efficacité. Si une telle politique était
menée l’intensité Carbone pourrait être
divisée par un facteur de l’ordre de 2 pour atteindre
environ 0,17 tC/tep, soit des émissions totales de 3,5
GtC en 2050. La stabilisation de la concentration en gaz carbonique
et, donc, de la température serait alors pratiquement obtenue.
En conclusion, et en schématisant, on peut dire que deux
voies sont ouvertes pour stabiliser la température moyenne
du globe :
• ou bien diviser par deux la consommation
énergétique mondiale, soit, pour les pays développés
la diviser par au moins quatre
• ou bien renoncer à l’utilisation
des combustibles fossiles pour la production de chaleur et d’électricité, et, dans l’état actuel des technologies, cela n’est
possible que par un développement massif de l’usage
de l’énergie nucléaire.